=
Les Troyens | |
Couverture de l’édition originale
de la partition (piano-chant) | |
Genre | Opéra |
---|---|
Nbre d'actes | 5 actes |
Musique | Hector Berlioz |
Livret | Hector Berlioz |
Langue originale | Français |
Durée approximative | 4h00 |
Dates de composition | 1856-1858 |
Création | 4 novembre 1863 Théâtre-Lyrique de Paris, France |
"Les Troyens" est un opéra en cinq actes d’Hector Berlioz sur un livret du compositeur, qui s'est inspiré de l’Énéide de Virgilio.
"Les troyens" fut donné pour la première fois, mutilé de nombreuses manières — les deux premiers actes supprimés, divers morceaux également coupés, le tout étant présenté sous le titre "Les Troyens à Carthage" — le 4 novembre 1863 au Théâtre Lyrique à Paris, sous la direction d'Adolphe Deloffre.
La première partie, "La Prise de Troie", ne fut créée que le 6 décembre 1890 à Karlsruhe, dans une version allemande, sous la direction de Felix Mottl, à l'occasion de la première représentation intégrale de "Les Troyens" en deux soirées (la seconde partie, "Les Troyens à Carthage", fut jouée le lendemain 7 décembre[note 2]).
L’échec de Benvenuto Cellini en 1838 avait poussé Berlioz à rechercher d’autres formes d’expression que l'opéra.
L'accueil catastrophique de La Damnation de Faust, en 1846, l'avait ensuite découragé d'écrire pour la scène.
Dans le chapitre LIX, qui devait achever ses Mémoires, le compositeur note en 1854 :
Depuis trois ans, je suis tourmenté par l'idée d'un vaste opéra dont je voudrais écrire les paroles et la musique.
Je résiste à la tentation de réaliser ce projet et j'y résisterai, je l'espère, jusqu'à la fin.
Le sujet me paraît grandiose, magnifique et profondément émouvant, ce qui prouve jusqu'à l'évidence que les Parisiens le trouveraient fade et ennuyeux.
Une note, ajoutée en bas de page en 1858, corrige cette douloureuse déclaration :
Hélas !
Non, je n'ai pas résisté.
Je viens d'achever le poème et la musique des Troyens, opéra en cinq actes.
Que deviendra cet immense ouvrage?
Berlioz explique lui-même les raisons de ce revirement, dans la « postface » de ses Mémoires :
Me trouvant à Weimar chez la princesse de Wittgenstein (amie dévouée de Liszt, femme de cœur et d'esprit, qui m'a soutenu bien souvent dans mes plus tristes heures), je fus amené à parler de mon admiration pour Virgilio et de l'idée que je me faisais d'un grand opéra traité dans le système shakespearien, dont le
deuxième
et le
quatrième
livre de l'Énéide seraient le sujet.
J'ajoutai que je savais trop quels chagrins une telle entreprise me causerait nécessairement, pour que j'en vinsse jamais à la tenter.
En effet, répliqua la princesse, de votre passion pour Shakespeare unie à cet amour de "l'antique", il doit résulter quelque chose de grand et de nouveau.
Allons, il faut faire cet opéra, ce poème lyrique.
Appelez-le et disposez-le comme il vous plaira.
Il faut le commencer et le finir.
Comme je continuais à m'en défendre :
Écoutez, me dit la princesse, si vous reculez devant les peines que cette œuvre peut et doit vous causer, si vous avez la faiblesse d'en avoir peur et de ne pas tout braver pour DIDONE et CASSANDRA, ne vous représentez jamais chez moi, je ne veux plus vous voir.
Il n'en fallait pas tant dire pour me decider.
De retour à Paris, Berlioz commence l'écriture du livret et de la partition, achevée le 12 avril 1858 dans une première version, avec ces vers de Virgilio en note :
Quidquid erit,
Superanda omnis ferendo fortuna est. |
Quoi qu'il arrive,
il faut surmonter les revers de fortune en les supportant. |
Personnages:
Rôle | Voix | Interprètes de la création (Les Troyens à Carthage, actes III à V des Troyens) 4 novembre 1863 (direction : Adolphe Deloffre, Hector Berlioz[3]) | Interprètes de la création (Les Troyens, en deux soirées) 6 et 7 décembre 1890 (direction : Felix Mottl[4]) |
---|---|---|---|
Priamo, roi des troyens Fantôme de Priamo (acte V) | basse | ||
Ecuba, reine de Troie | soprano | Pauline Mailhac | |
Cassandra, leur fille, prophétesse de Troie Fantôme de Cassandra (acte V) | mezzo-soprano | Luise Reuss-Belce | |
Eleno, fils de Priam, prêtre troyen | ténor | Hermann Rosenberg | |
Polissena, fille de Priam | soprano | Annetta Heller | |
Chorèbe, un jeune prince d’Asie Mineure, fiancé à Cassandre/Fantôme de Chorèbe (acte V) | baryton | Marcel Cordes | |
Enea, prince troyen, fils Venere et Anchise | ténor | Jules-Sébastien Monjauze | Alfred Oberländer |
Ascanio, son fils | soprano | Mme Estagel | Auguste Elise Harlacher-Rupp |
Panthée, un prêtre troyen | basse | Péront | Carl Nebe |
Fantôme d’Ettore (acte II) | basse | ||
Andromaca, veuve d’Hector | rôle muet, pantomime (acte I) | ||
Astianatte, fils d’Hector et Andromaque | rôle muet, pantomime (acte I) | ||
Un capitaine grec (acte II) | basse | Fritz Plank | |
Didone, reine de Carthage, veuve de Sychée | mezzo-soprano | Anne-Arsène Charton-Demeur | Pauline Mailhac |
Anna, sœur de Didone | contralto | Marie Dubois | Christine Friedlein |
Narbal, ministre de Didone | basse | Jules "Giulio" Petit | Fritz Plank |
Iopas, poète à la cour de Didone (acte IV) | ténor | De Quercy | Hermann Rosenberg |
Hylas, un jeune marin phrygien (acte V) | ténor | Edmond Cabel[5] | Wilhelm Guggenbühler |
Mercurio, messager des dieux (acte IV) | basse | ||
Deux soldats troyens (acte V) | baryton, basse | Guyot, Teste | |
Troyens, Grecs, Tyriens et Carthaginois, etc. | Chœurs mixtes |
Le rôle féminin principal est, aux actes I et II, Cassandra et, aux actes III, IV et V, Didone.
Une chanteuse peut chanter les deux rôles, comme cela a été le cas de Régine Crespin pour un disque d'extraits enregistré en 1965 sous la direction de Georges Prêtre.
Cependant, chaque rôle réclame beaucoup en lui-même, et les mises en scène des Troyens favorisent plutôt l'emploi de deux chanteuses distinctes.
Le premier acte est véritablement « l'acte de Cassandre » :
Dès le départ du chœur de la populace troyenne, le personnage reste constamment sur scène, agissant ou commentant l'action.
Le cinquième acte est aussi appelé « l’acte de Didone » : divisé en trois tableaux, il contient le monologue
« Ah, ah ! je vais mourir » et l’air
« Adieu, fière cité »
à la fin du deuxième tableau.
La mort de Didone, ses imprécations contre Enea puis son appel final, annonçant la grandeur de la « Rome immortelle ! » sont parmi les pages les plus célèbres de l’opéra.
Le rôle principal masculin est celui d’Enea, dont l’entrée,
« Du peuple et des soldats »,
est une des plus spectaculaires de tout le répertoire, plus animée encore que celle de l'Otello de Verdi.
Le ténor arrive en courant, raconte la mort de Laocoonte sur une phrase à la tessiture exigeante, enchaînant immédiatement sur le grand octuor vocal avec chœurs.
Son duo avec Didone à l'acte IV,
Nuit d'ivresse et d'extase infinie
enchaîné sur le septuor des Troyens, est un des morceaux les plus applaudis, et ce dès les premières représentations.
Ettore et Andromaca apparaissent tous deux de manière originale dans l’opéra.
Andromaque apparaît avec son fils Astianatte pendant l’acte I, mais pour une pantomime pendant que chante le chœur.
Quant à Ettore, il apparaît sous la forme d’un spectre au premier tableau de l’acte II, engageant Enea à partir de Troie pour fonder Rome (« Ah !… fuis, fils de Vénus »).
Il réapparaît au dernier acte pour rappeler ce devoir à Énée qui doit « vaincre et fonder. »
Instrumentation des Troyens |
Orchestre |
Bois |
1 petite flûte, 2 flûtes (la 2nde joue aussi la petite flûte), 2 hautbois (le 2nd joue aussi le cor anglais), 2 clarinettes (la 2nde joue aussi la clarinette basse), 4 bassons |
Cuivres |
4 Cors, 2 Trompettes à pistons, 2 cornets à pistons, 3 trombones, 1 tuba |
Percussions |
6 à 8 harpes, 3 timbales, cymbales, deux paires de cymbales antiques, jeu de triangles, tambour militaire (avec timbre / sans timbre), tambourin, grosse caisse |
Cordes |
premiers violons, seconds violons, altos, violoncelles, contrebasses |
Musique de scène |
Bois |
3 hautbois |
Cuivres |
2 Trompettes, 2 cornets à pistons, 3 trombones, 1 tuba, 1 petit saxhorn suraigu en Si, 2 saxhorns sopranos en Mi, 2 saxhorns contraltos en Si, 2 saxhorns ténors en Mi |
Percussions |
2 paires de timbales, plusieurs paires de cymbales (derrière la scène), darbouka, tam-tam (derrière la scène), machine à tonnerre (éoliphone) |
La Prise de Troie
Atto I
Le camp abandonné des Grecs dans la plaine de Troie
N°1 : Chœur de la populace troyenne - « Après dix ans passés dans nos murailles »
et Air (« Malheureux Roi ! dans l'éternelle nuit »)
Acte II[modifier | modifier le code]
Premier Tableau[modifier | modifier le code]
Un appartement du palais d'Enée. Rumeurs de combats au loinSecond Tableau[modifier | modifier le code]
Un intérieur du palais de Priamo. L'autel de Cybèle est alluméLes Troyens à Carthage[modifier | modifier le code]
Acte III[modifier | modifier le code]
Une vaste salle de verdure du palais de Didon à Carthage- N°19 : Récitatif et air de Didon - « Nous avons vu finir, en sept ans à peine »
- N°20 : Entrée des constructeurs (Ballet)
- N°21 : Entrée des matelots (Ballet)
- N°22 : Entrée des laboureurs (Ballet)
- N°23 : Récitatif et chœur
- N°24 : Duo de Didon et Anna - « Les chants joyeux, l'aspect de cette noble fête »
- N°25 : Récitatif et air de Didon - « Errante sur les mers »
- N°26 : Marche troyenne (dans le mode triste)
- N°27 : Récitatif de Didon et Ascaio -
- N°28 : Final - « J'ose à peine annoncer la terrible nouvelle »
Acte IV[modifier | modifier le code]
Premier Tableau[modifier | modifier le code]
- N°29 : Chasse royale et orage (pantomime)
Second Tableau[modifier | modifier le code]
Les jardins de Didon sur le bord de la mer. Le soleil se couche- N°31 : Air (« De quels revers menaces-tu Carthage »), cavatine (« Vaine terreur ! Carthage est triomphante ») et duo (superposition des deux précédents)
- N°32 : Marche pour l'entrée de la reine
- N°33 : Ballet - Pas des almées - Danse des esclaves - Pas d'esclaves nubiennes
- N°34 : Scène et chant d'Iopas - « ô blonde Cérès »
- N°35 : Récitatif et Quintette - « Tout conspire à vaincre mes remords »
- N°36 : Récitatif et Septuor - « Tout n'es que paix et charme autour de nous »
- N°37 : Duo nocturne - « Nuit d'ivresse et d'extase infinie »
Acte V[modifier | modifier le code]
Premier Tableau[modifier | modifier le code]
Le bord de la mer, couvert de tentes troyennes- N°38 : Chanson d'Hylas - « Vallon sonore »
- N°39 : Récitatif et chœur des chefs troyens - « Préparez-vous, il faut partir enfin »
- N°40 : Duo de soldats en sentinelle - « Par Bacchus ! ils sont fous avec leur Italie !... »
- N°41 : Récitatif mesuré et air d'Enée - « Inutiles regrets »
- N°42 : Scène (apparition des fantômes) - « Enée !...»
- N°43 : Scène et chœur - « Debout, Troyens ! éveillez-vous, alerte ! »
- N°44 : Duo et chœur - « Errante sur tes pas »
Second Tableau[modifier | modifier le code]
Les appartements de Didon. Le jour se lève- N°45 : Scène - « Va, ma sœur, implorer »
- N°46 : Scène - « Les Troyens sont partis ! »
- N°47 : Monologue de Didon - « Ah ! Ah ! je vais mourir... »
- N°48 : Air - « Adieu, fière cité »
Dernier Tableau[modifier | modifier le code]
Le bûcher, où sont placées les armes d'Enée- N°49 : Cérémonie funèbre - « Dieux de l'oubli, dieux du Ténare »
- N°50 : Scène - « Pluton... semble m'être propice »
- N°51 : Chœur - « Ah ! Au secours ! Au secours ! La reine s'est frappée »
- N°52 : Imprécation (« Du destin ennemi, l'implacable fureur ») et Final - « Rome... Rome... Immortelle ! »
- N°52 : Final primitif[7] - « Fuit Troja ! Stat Roma ! »
Selon Jean-Michel Brèque, "Les Troyens" appartiennent au genre de la « tragédie lyrique » par son sujet, très proche de ceux des chefs-d'œuvre de Gluck et de Rameau au XVIIIe siècle, qui « désertaient les scènes lyriques au début du XIXe siècle »[8].
Le sujet virgilien avait déjà inspiré à Cavalli son Didone ed Enea, Purcell son Didon et Énée (1689).
Cependant, Berlioz a tenu à rédiger lui-même son livret, en s'appuyant exclusivement sur le texte de l'Énéide (principalement les chants II et IV), dont il avait une connaissance parfaite depuis l'adolescence.
Revenir à un sujet antique, et au caractère « versaillais » de l'opéra devait apparaître comme une exhumation d'un genre défunt en un temps où triomphait le mélodrame verdien et s'annonçait le drame wagnérien.
Berlioz, revenant à ses premières amours musicales et littéraires, était parfaitement conscient de ce décalage avec le goût du public.
L'époque n'était plus à de tels sujets, quand bien même la manière de les traiter eût été résolument moderne.
L'emploi du vers libre, de la rime et des procédés de la rhétorique traditionnelle a été très reproché à Berlioz, comme celui d'un vocabulaire poétique considéré comme désuet, sinon obsolète
« hymen », « transports » amoureux, « débris » de Troie pour désigner ses ruines, « travaux » ou « labeurs » pour signifier les épreuves des Troyens et des Carthaginois[9].
Jean-Michel Brèque parle d'« alexandrins d'un autre âge », comparant les vers « les plus médiocres et les plus quelconques, voire les plus plats » du livret à ceux qu'inspirait à Baudelaire les mêmes passages de l'œuvre de Virgile :
Andromaque, des bras d'un grand époux tombée,
Vil bétail, sous la main du superbe Pyrrhus,
Auprès d'un tombeau vide en extase courbée,
Veuve d'Hector, hélas, et femme d'Hélénus[10].
Vil bétail, sous la main du superbe Pyrrhus,
Auprès d'un tombeau vide en extase courbée,
Veuve d'Hector, hélas, et femme d'Hélénus[10].
Certes, ajoute-t-il, Berlioz forge parfois des formules belles et vigoureuses.
La séparation de Didon et Énée, en particulier, ne manque ni d'élan ni de noblesse —
« L'ordre divin pouvait seul emporter la cruelle victoire » d'Énée, auquel répond
Ne sois pas plus longtemps par mes cris arrêté,
Monstre de piété !
Va donc, va ! Je maudis et tes dieux et toi-même !
Monstre de piété !
Va donc, va ! Je maudis et tes dieux et toi-même !
Une lecture superficielle du livret pourrait conduire à une appréciation négative.
Certains vers sont directement inspirés, sinon « traduits » du texte latin — et la version de Berlioz est souvent d'une étonnante justesse.
Gérard Condé relève que l'évocation par Ascanio de l'écroulement du palais d'Ucalégon, si frappante[11], est de Berlioz :
O père ! le palais d'Ucalégon s'écroule.
Son toit fondant en pluie ardente coule !
Son toit fondant en pluie ardente coule !
Ces deux vers reprennent exactement ceux que cite le compositeur, au moment où il entreprend la rédaction de ses Mémoires, au lendemain de la révolution de 1848 :
« Jam proximus ardet Ucalegon ! » (Énéide, chant II, v.311-312)[1].
La redécouverte des Troyens, notamment par un public étranger « parmi lesquels les Anglais […] moins sensibles à cet aspect de l'opéra » , les représentations et les mises en scène renouvelées ont considérablement modifié l'appréciation du livret en lui-même.
Vingt ans après la critique plutôt négative de Jean-Michel Brèque, André Tubeuf s'émerveille de ces alexandrins « que Corneille aurait pu écrire »[12], la grandeur tragique de Cassandre s'écriant :
C'est le temps de mourir et non pas d'être heureux.
Le salut des vaincus est de n'en plus attendre.
Œuvre composée entre 1856 et 1858, Les Troyens a connu de grosses difficultés pour être monté.
L’opéra a dû être divisé en deux parties inégales et intitulées a posteriori: La Prise de Troie, d’une heure et demie, et Les Troyens à Carthage, de deux heures et demie.
Berlioz n’a vu de son vivant que cette dernière partie, représentée au Théâtre-Lyrique de Paris le 4 novembre 1863.
La première partie sera donnée en version de concert en 1879.
L’intégrale presque complète a été donnée pour la première fois à Karslruhe les 6 et 7 décembre 1890.
Parmi les raisons invoquées pour la division comptent la longueur de l’œuvre (quatre heures) bien que certains opéras de Wagner atteignent cette durée, et l’importance des moyens mis en œuvre, avec le fameux cheval mais aussi les effectifs orchestraux et choraux.
Lors des répétitions qui conduiront à la première représentation, l’originalité de la partition avait décontenancé les interprètes, à qui le directeur du théâtre, Carvalho, avait de surcroît laissé peu de temps afin de pouvoir rentrer plus vite dans ses frais.
L'œuvre Les Troyens à Carthage ne rencontra pas l'insuccès.
Elle est même critiquée très positivement par Clément et Larousse dans le Dictionnaire des opéras de 1905, à l'article intitulé paradoxalement « Les Troyens » alors qu'il ne s'agit encore que de l'épisode carthaginois.
La première parisienne date de 1921 seulement, mais dans une version abrégée.
La première véritable intégrale en une seule soirée est celle donnée en 1957 à Covent Garden à Londres.
Elle a été suivie de l'enregistrement de 1969 fait par Colin Davis, édition qui reste de référence encore actuellement (même si la version plus complète de Charles Dutoit est sortie en 1994, en intégrant le prélude des Troyens à Carthage placé au début de l'acte III).
Dans ses Mémoires[13], Berlioz nous renseigne exactement sur les coupures faites pour la création des Troyens à Carthage à Paris :
- l'entrée des constructeurs (acte III des Troyens)
- celle des matelots (acte III)
- celle des laboureurs (acte III)
- l'intermède instrumental (Chasse royale et orage - acte IV)
- la scène et le duo entre Anna et Narbal (acte IV)
- le deuxième air de danse (ballets de l'acte IV)
- les strophes d'Iopas (acte V)
- le duo des sentinelles (acte V)
- la chanson d'Hylas (acte V)
- le grand duo entre Enée et Didon : Errante sur tes pas (acte V)
La perte la plus impressionnante est sans doute la magnifique Chasse royale et orage. Sans considérations de mise en scène (cet intermède étant, le plus souvent, interprété devant le rideau baissé) le niveau d'exigence musicale est sans équivalent à son époque, surtout pour les questions de rythmes.
Berlioz a toujours été reconnu comme un maître dans ce domaine, très supérieur à Wagner, et le passage suivant a de quoi provoquer le vertige :
« Chasse royale et orage » des Troyens. | |
Beecham choral Society, Orchestre philharmonique royal, Sir Thomas Beecham, direction (1947). |
À ces déplacements constants des temps forts et faibles dans l'ensemble orchestral s'ajoute l'intervention du chœur qui, après une entrée vocalisée et sauvage, s'écrie « Italie ! »[14] avec une puissante anacrouse.
La présence des timbales sur scène et devant la scène, frappant simultanément, n'a rien de gratuit : Berlioz n'ignorait pas qu'un infime décalage naîtrait, à l'audition, du fait de points de départs différents dans l'espace (ici, la simple lecture de la partition se révèle insuffisante...) et la grosse caisse, une nuance plus douce que les timbales, mais toujours à contretemps, achève de créer l'instabilité.
Il est assez fréquent de voir les orchestres « perdre la tête » à ce moment, qui anticipe d'un demi-siècle sur un célèbre passage de La Mer de Claude Debussy[15]. « C'est confus et génial comme une esquisse de Delacroix », déclarait Albéric Magnard, assistant à la première représentation intégrale des Troyens à Carthage en 1890.
Il est difficile de proposer un commentaire d'une œuvre aussi vaste que les Troyens.
On ne saurait mieux dire, du reste, que ce qu'écrivait Ferruccio Busoni.
De la partition des Troyens de Berlioz, j'ai tiré et je tire un grand profit.
Comme c'est stimulant ! Quelle richesse !
Berlioz est le seul compositeur qui cherche toujours à inventer quelque chose. À chaque page, il y a quelque chose de nouveau et de surprenant[16] ».
Carrière des Troyens[modifier | modifier le code]
Un long purgatoire[modifier | modifier le code]
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète. Votre aide est la bienvenue !
La résurrection[modifier | modifier le code]
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète. Votre aide est la bienvenue !
Postérité musicale[modifier | modifier le code]
En France : Influences[modifier | modifier le code]
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète. Votre aide est la bienvenue !
À l'étranger : Hommages[modifier | modifier le code]
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète. Votre aide est la bienvenue !
Notes et références[modifier | modifier le code]
Notes[modifier | modifier le code]
- Détruit par le feu de la Commune en 1871 ce théâtre fut reconstruit à l'identique en 1874 et rebaptisé plusieurs fois depuis. Situé à la Place du Châtelet, le Théâtre Lyrique se nomme aujourd'hui Théâtre de la Ville.
- Le compositeur Albéric Magnard, qui était présent, témoigne : « Cinq Français dans la salle » dans son article du Figaro, le 8 décembre 1890.
Références[modifier | modifier le code]
- Mémoires, p. 550.
- Hugh MacDonald, p. 23.
- Information from AmadeusOnline.net [archive]
- Information from AmadeusOnline.net [archive]
- Edmond Cabel n’interpréta la "chanson d’Hylas" que lors de la première représentation. Son contrat ne lui imposait de chanter que 15 fois par mois. Son rôle dans l’opéra de Félicien David La perle du Brésil ayant rempli cette obligation, le théâtre-lyrique aurait dû lui verser 200 francs pour chaque nouvelle représentation. Berlioz, « retenu au lit, exténué par une bronchite », regretta beaucoup cette décision prise sans le consulter. Les calculs mesquins qui motivaient cette coupure sont révoltants. (Postface des Mémoires du compositeur, ed.Flammarion, coll.Harmoniques 1991, p.575 et Walsh 1981, pp. 170, 375 Kutsch and Riemens 2003, pp. 675, 1228.)
- Cette scène, supprimée par le compositeur, a été réorchestrée à partir de la partition chant-piano par Hugh MacDonald, en, 1986, et se trouve intégrée dans certaines mises en scène de l'opéra.
- Cette version, plus longue et faisant intervenir des apparitions de la gloire future de Rome, a été remplacée par Berlioz en combinant habilement les chants de colère des Carthaginois (« Haine éternelle à la race d'Enée ») et la marche troyenne. La version « longue » a été représentée, revue et passablement raccourcie, dans la production de l'Opéra-Bastille en 2003
- Jean-Michel Brèque, p. 32.
- Jean-Michel Brèque, p. 42.
- Charles Baudelaire, Les fleurs du Mal, « Le cygne », v. 37-40.
- Gérard Condé, p. 72.
- André Tubeuf, p. 74.
- Postface - Les Troyens, représentations de cet ouvrage à Paris, ed. Flammarion, coll. Harmoniques, 1991, pp.567 à 576
- Cet appel signifie, à la fin de l'acte II et dans tout l'acte IV, le devoir d'Enée qui doit aboutir à la fondation de Rome - devoir auquel il manque en prolongeant son séjour à Carthage.
- Voir l'analyse de Jean Barraqué dans son Debussy, ed. du Seuil, coll. Solfèges, 1962 (ed. rev.1994), p.190
- Ferruccio Busoni,Correspondance, traduction de Gilles Demonet, cité dans le n°193 de l'Avant-Scène Opéra consacré au Doktor Faust de Busoni (1999)
Annexes[modifier | modifier le code]
Discographie sélective[modifier | modifier le code]
- 1969 : Josephine Veasey, Jon Vickers, Berit Lindholm, Roger Soyer - Orchestre de Covent Garden, dir.Colin Davis - (Philips) - CD (premier enregistrement mondial)
- 1983 : Jessye Norman, Placido Domingo, Tatiana Troyanos, Paul Plishka, Allan Monk - Metropolitan Opera Orchestra, dir.James Levine - (DG) - DVD
- 1994 : Françoise Pollet, Gary Lakes, Deborah Voigt, - Orchestre symphonique de Montréal, dir.Charles Dutoit - (Decca) - CD (version incluant la « scène de Sinon »)
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Hector Berlioz, Mémoires, Paris, Flammarion, coll. « Harmoniques », 1991 (ISBN 978-2700021028), présentés par Pierre Citron
- Gérard Condé, Les Troyens, Paris, L'Avant-Scène Opéra n°128-129, 1990 (ISSN 0764-2873)
- André Tubeuf, Dictionnaire amoureux de la musique, Paris, Plon, 2012 (ISBN 978-2259215978)
- Dominique Catteau, Les Troyens d'Hector Berlioz ou La tragédie de l'Absence, Paris, Société des Écrivains, 2013 (ISBN 978-2-342-01088-6)
Lien externe[modifier | modifier le code]
- Les Troyens de Berlioz : partitions libres dans l’International Music Score Library Project.
No comments:
Post a Comment